Help, please? [Kim Jae Wun]

À force cela devenait une habitude. Depuis que Tae Hwan était entré dans la garde royale, mais surtout devenu mon garde personnel, la possibilité de m’aventurer hors du Palais était presque un rituel. Nous nous étions rapprochés et sommes devenus de très bons amis. Il est même le seul véritable ami que j’ai, et je le considère presque comme un frère. Au départ je l’autorisais à m’accompagner lors de mes escapades, à nous deux, nous formions un magnifique duo, on se faisait passer pour deux frères. Mais au fur et à mesure je lui demandais de rester au Palais, afin de couvrir mes arrières, bien qu’il était contre mon avis, je lui promettais à chaque fois d’être prudent. De toute évidence ce n’était pas comme si je ne savais pas me défendre, j’avais eu un excellent professeur, sans compter les innombrables heures d’entraînement et d’exercices que nous nous adonnions Tae Hwan et moi. Si avec ça je n’étais toujours pas capable de me défendre, alors c’est que j’étais encore loin d’être digne d’un Roi et qu’on devrait me retirer le titre de prince.

C’est donc sans Tae Hwan que je m’aventurais dans les rues de la capitale, seul. Ce jour là il pleuvait, mais cela n’empêchait pas les commerçants de marchander, ni les citoyens de venir faire leurs courses. Les enfants non plus, la pluie ne leur faisait pas peur, comme s’ils étaient habitués. Avec cette cape toute délavée et cette capuche au dessus de ma tête je me faisais plus passer pour un roturier qu’un paysan de la ville. J’espérais tout de même qu’on ne vienne pas me chercher les ennuis.

Alors que je vagabondais de stand en stand, j’essayais de me frayer un chemin parmi cette foule immense qui se précipité en direction d’un stand. Les gens se battaient afin de pouvoir avoir une place. Dan l’élan j’arrêtais quelqu’un en lui tapotant l’épaule et lui demanda ce qui se passait.

« Vous n’êtes donc pas au courant ? » avait-il dit sur un ton plus effrayé qu’étonné. « L’une des disciples de la grande dame est de retour parmi nous ! Elle peut lire votre avenir, aussi bien qu’elle peut voir votre passé. Si j’étais vous je me dépêcherai de faire la queue avant qu’elle ne s’en aille. »

La grande dame ? Je le regardais d’un drôle d’air. Je n’en avais jamais entendu parler, j’ignorai complètement qui elle pouvait être. Était-elle à ce point si remarquable pour que les gens se hâtent et se battent comme des bêtes pour la voir ? Je m’inclinais pour remercier le vieil homme avant qu’il ne décampe en vitesse, faire la queue comme ses camarades. Par curiosité j’eu l’envie, moi aussi, d’aller la rencontrer. Si elle était si formidable et talentueuse que ce que l’on racontait, j’aimerai qu’elle me partage mon futur. Ce vieil homme avait réussi à susciter mon attention, moi aussi il me fallait ma place. Je me fondais donc la masse, prêt à bousculer toute personne qui oserait passer sur mon chemin. Par chance je pu attraper l’un des bracelets de couleurs auquel était attaché un numéro qui me servirait de ticket pour annoncer mon tour. En échange il nous fallait donner une certaine somme d’argent.
Les heures s’écoulèrent alors que je ne voyais toujours pas mon tour arriver. La pluie avait cessé depuis déjà un moment et les personnes devant moi commencèrent à se plaindre.

« Bon alors, ça avance ? » « Qu’est ce qu’ils font ? Pourquoi c’est si lent ? »

Les plaintes tombèrent les unes à la suite des autres sans qu’on ne vienne nous en expliquer la raison. C’était étrange, vraiment étrange. Était-ce vraiment la réelle disciple de la grande dame ? Un doute parcouru mon échine alors que je me questionnais. Peut être était-ce une arnaque ? En y repensant on nous avait fait payer avant même qu'on nous autorise l’accès à ce chapiteau, comment pouvait-on être sûr qu’ils n’avaient pas pris la fuite ? Je tapotais l’épaule de la jeune dame devant moi afin de la questionner.

« Excusez-moi » Elle se retourna brusquement en ma direction comme si elle s’apprêtait à me sauter au cou. « Avez-vous déjà rencontré la disciple de la grande dame ? » Elle me fusilla du regard tout en marmonnant quelques mots dont j’eu du mal à déchiffrer. « Mais je t’en pose des questions ! Qu’est ce que j’en sais moi, on m’a dit qu’elle était la disciple de la grande dame, alors je suis venue ! Oh et puis pourquoi je perdrai mon temps avec roturier comme toi ! »

Elle se retourna afin de ne plus me faire face. Ne pouvant plus patienter plus longtemps, je décidais de m’écarter de la foule et mener ma propre enquête. Si personne ne voulait m’aider alors j’allais me débrouiller seul. Je remarquais que le chapiteau se tenait devant un magasin qui bloquait l’entré. Étonné je fis le tour du bâtiment avant d’être bloqué par des barrières en bois qui empêchaient de rejoindre l’arrière de la boutique, et que j’escaladais en m’adossant au mur du bâtiment. De l’autre côté j’apercevais dans un coin deux hommes discuter et une femme voilée par son chapeau, recouverte d’un tissu très fin noir. Je devinais qu’elle devait être cette soit disante disciple.

Finalement mes craintes et soupçons se voyaient vrai. À juger par leurs dires ils avaient réussis à monter leur coup, et se dépêchaient pour ranger tout l’argent récolté dans des tonneaux qu’ils recouvraient de farine. Un petit chemin était tracé à l’arrière et mené directement sur un sentier dans la forêt afin de rejoindre la grande route principale pour quitter la capitale. Des imposteurs, oui. Je n’allais certainement pas les laisser filer sans rien faire. Il fallait que quelqu’un les arrête et que justice soit faite.

Comme prévu, quelques minutes plus tard ils atteignirent le sentier dans la forêt. Caché derrière un buisson, je les observais en silence. Lorsqu’ils arrivèrent à mon niveau je sortis de ma cachette, et leur barrais la route.

« Pas un pas de plus, où je vous fait arrêter. Rendez ce que vous avez volé et je vous épargnerai. » Ils me dévisagèrent tous sans exception. « Et on peut savoir qui tu es ? » me demanda celui qui tenait la charrette. « Je suis Yi Yeon Su, fils du Roi Seongjo, et prince de Joseon. » Je m’arrête un instant, fier, pensant réellement que seul mon nom les craindrait. Mais à la place ils se mirent tous à rire et un autre d’entre eux prit la parole. « Ouais c’est ça ! Et moi je suis le second fils du Roi. Écarte-toi gamin, ou tu pourrais te faire mal. »

Ils se mirent de nouveau à rire de plus belle et leurs regards devinrent plus menaçant. J’oubliais que mon accoutrement ne leur permettait pas de me croire, et c’est pourquoi ils s’autorisaient à jouer les malins. Je n’eu pas le temps de penser à quoi que ce soit, qu’un des types finit par perdre patience et descendit de la charrette. Il s’approcha à petit pas, avant de se jeter sur moi et me porter un coup à la mâchoire.

« Ça t’apprendra, sale gamin. »

Un filet de sang coula le long de ma lèvre avant que je ne rejette le reste du sang qui se forma dans le fond de ma gorge. Je me relevais en m’appuyant sur mes genoux et leur fis face de nouveau. Je leur adressais un signe de la main, les invitant à m’approcher. Deux d’entre eux n’attendirent pas plus longtemps avant de s’armaient de gros morceaux de bois, taillés à ce que cela conviennent en tant qu’arme.

Alors que l’un d’entre eux pointait l’arme au dessus de mon crâne, je sentais que la fin allait approcher. Peut être avais-je eu tors de me confronter à plus fort que moi. Je faisais bien le fier à croire que je pouvais les arrêter à moi seul, mais en réalité ce fut tout le contraire. J’étais bien misérable et petit face à eux, et ils étaient bien lâches d’user d’armes, alors que j’étais venu seul à mains nues. J’étais déjà bien amoché, et le deuxième m’avait obligé à me mettre à genoux, pensant que j’allais les supplier de m’épargner. Quels imbéciles. Je préférais mourir dignement pour la bonne cause, plutôt que de continuer à vivre dans la honte. Alors que je me résignais, une idée me traversa l’esprit. Peut être qu’avec un peu de chance ils tomberont dans le panneau, et qui sait, cela fera gagner du temps, quelqu’un par tout hasard passerait dans le coin. Il me fallait juste réussir à les désarmer, et m’emparer d’une des leurs, afin que le combat puisse devenir équitable.

« Attendez une seconde ! » Je lève ma tête vers les cieux. « Qu’est ce qui vous fait croire que je ne suis pas le vrai Prince Yi Yeon Sun ? » Je plonge alors mon regard dans les prunelles du voleur. « Si j’étais vous, j’éviterai de faire ça, ou bien très vite on vous poursuivra et vous serez condamné à la peine de mort. Jamais le Roi ne pardonnera ceux qui s’en sont pris au Prince, et la garde Royale vous poursuivra sans relâche, jusqu’à vous retrouver. » Je détourne légèrement mon visage par-dessus mon épaule tentant de convaincre l’autre. « Voyons, je vous pensais bien plus intelligents que ça, messieurs. » De nouveau le sang se forma à l’intérieur de ma gorge, m’obligeant à le rejeter avant de reprendre avant qu’ils ne perdent patience. « J’aurai mieux fait en demandant une rançon. Pourquoi se contenter du minimum quand on peut gagner plus ? Mais surtout sans avoir à se salir les mains ? »

Ils se mirent tous à rire suite à mes réflexions, et je fis de même, espérant très fort qu’ils tombent dans le panneau. Mais celui qui me tenait à l’arrière finit par me porter un violent coup dans l’estomac. Je me tordis de douleur alors qu’il s’apprêtait à m’en porter un autre, son coup fut retenu par un des leurs.

« Et qu’est ce qui nous fait croire que tout ce que tu dis est vrai ? Pourquoi un Prince s’aventurerait seul hors du Palais, sans ses gardes, et vêtu de haillons ? À moins d’être fou. » Avait demandé celui qui avait retenu le coup. Un léger sourire se dessina sur mes lèvres malgré la douleur ardente qui me prenait. Je m’obligeais toutefois à m’asseoir sur le par terre terreux afin de leur faire face avec dignité. « C’est juste. Rien ne prouve que je sois un Prince, surtout dans un tel accoutrement. Vous avez seulement ma parole contre la vôtre. » Je finis par essuyer le filet de sang qui coulait le long de mon menton, de mon pouce avant de reprendre. « À vous d’en juger. »

J’étais fou oui, quel abruti allait croire un roturier qui se fait passer pour un des Princes de Joseon. Et pourtant, je  réussis à mettre le doute chez certains d’entre eux, mais d’autres se méfiaient totalement de mes paroles, et essayèrent de persuader leurs camarades que je tentais simplement de les piéger.  Leur attention relâchée, je m’aventurais à petit pas, toujours assis, afin de m’emparer d’un des bâtons abandonnés au sol, malheureusement pour moi ils remarquèrent la supercherie et ramassèrent à temps leurs armes avant de me menacer.

« Espèce de petit minable, tu as tenté de nous tromper ! Tu vas voir ce que c’est de se confronter à de vrais escrocs. »

Ils s’avancèrent tous en ma direction, prêt à me donner une bonne leçon, et alors que je crus que mon heure arrivait, un homme se posta entre eux et moi, l’épée à la main. Je ne le reconnu pas de suite, mais son accoutrement suffit pour me faire comprendre qu’il appartenait à la garde Royale. En un rien de temps il finit par tous les mettre à terre, certains même furent obliger de battre en retraite. Après les avoir tous bien attacher afin qu’ils ne s’échappent pas, l’homme se tourna vers moi afin de s’assurer que j’aille bien.

« Je vais bien. Merci. » Cette fois-ci je le reconnu, son visage m’était familier, mais je n’étais plus très sûr. Je fus étonné qu’il ne me fasse pas la morale après avoir découvert ma petite escapade hors du Palais, mais surtout après avoir désobéit au Roi. « Personne ne doit être au  courant. Et surtout pas le Roi. Ou sinon je m’attirerai encore sa colère. » Je me racle la gorge avant de reprendre. «Je vous dois une dette. Je ne l’oublierai pas. »

Retourner au Palais ? Avais-je bien entendu ? Je n’en avais pas envie, et si l’on m’apercevait couvert de blessures, que dirait-on ? Je me ferai encore, pour une énième fois passer pour l’imbécile du Palais, le plus incapable de tous les Princes de Joseon. Non, il n’en était pas question, je devais au moins attendre la tombée de la nuit si je voulais passer inaperçu. J’imaginais là, bien ma tendre mère me faire un sermon, mais aussi capable de faire renvoyer Tae Hwan. Ils s’en prendront directement à ce dernier, après avoir découvert qu’il m’avait laissé m’échapper du Palais, alors que le Roi avait fait ordonner à la garde royale de redoubler de vigilance. Il n’en était pas question. Pas Tae Hwan. Je n’osais toutefois pas le lui dire dès à présent, je préférai patienter, attendre que la  situation se calme après que les escrocs auront été mis sous les barreaux. Je ne bronchais donc pas, et le suivis simplement.

Arrivé au marché, les commerçants et citoyens se mirent à lancer des cailloux sur les bandits lorsque nous arrivons à leur hauteur. À ce moment même plusieurs soldats appartenant à la police civile arrivèrent et demandèrent ce qui se passait pour qu’il y ait autant de chahut. Alors que le garde royale se mit à expliquer la situation tout en citant par la même occasion mon nom, je cru que j’allais lui écraser les pieds pour m’avoir trahit en désobéissant à ma demande un peu plus tôt. Ne lui avais-je pas demandé de garder le secret ? Que personne ne devait être mis au courant que le Prince Yi Yeon Sun était dans les parages ? Il venait tout droit de vendre mon âme au diable. Le rapport allait être fait, et mon nom figurera parmi les auteurs, témoins et autres. Que faire ? Je me mordais la lèvre inférieure avec telle force, que ma peau asséchée par les événements finit par s’érailler, et le goût de métal me monta très vite à la bouche. J’eu toutefois la chance que les soldats ne me demandent pas de suite. Alors qu’ils s’en allèrent au loin avec les bandits, le garde royale se retourna en ma direction, me demandant de monter à cheval. Je laissais échapper un soupir. Maintenant toute la population était mise au courant que le Prince Yi Yeon Sun se baladait dans la capitale vêtu de haillons pour passer inaperçu, va savoir s’ils ne finiraient pas par penser que je tentais d’échapper à mes responsabilités en tant que futur plausible Roi. Se serait tout simplement un miracle si cela ne venait pas à monter jusqu’aux oreilles du Roi.

Les citoyens se mirent alors à tous nous observer avec curiosité. J’entendais même certains se demander entre eux si j’étais réellement le Prince, et la raison qui m’avait poussé à me vêtir de la sorte. Ne pouvaient-ils pas être tout simplement reconnaissant ? Encore une fois, je me serai passé de commentaires.

Pour éviter de faire tout un cirque et d’attirer d’avantage les regards, je me contentais de monter à cheval, installé derrière lui. Je cachais tout de même mon visage sous ma capuche que je tenais fermement entre mes doigts. Je priais très fort qu’ils cessent de me jeter des regards suspicieux et haineux pour certains d’entre eux. La prochaine fois j’éviterai de leur venir en aide si c’était comme ça. Voilà comment on se faisait remercier.

Alors que nous nous éloignions de la foule et du marché, nous empruntons un chemin loin à l’abri des regards. C’est alors que je lui ordonnais d’arrêter le cheval. Lorsqu’il le fit, je descendis de l’animal, et levai la tête en direction du garde royal. « Vous auriez quand même pu inventer une histoire. » Dis-je sur un ton vexé. « Maintenant me voilà bien ridicule aux yeux toute la population. Je ne vais pas manquer de m’attirer les foudres de mon père ! » Je croise les bras tirant une fichue mou avant de reprendre. « Ne devait-on pas gardé ça secret ? » Cette fois je le fusille du regard tel un gamin insatisfait. « Je ne rentrerai pas au Palais. Si mère me voit dans cet état, elle serait capable de faire renvoyer Tae Hwan. Jamais je ne me pardonnerai de le voir renvoyer, tout ça à cause de mon irrésistible envie de fuir les murs de ce Palais. » Je baissais alors les yeux vers le sol rien que d’imaginer la scène. « Je vais attendre que la nuit tombe. Et faîte en sorte que mon nom ne figure pas dans le rapport. » Je finis par m’éloigner du jeune garde avant d’emprunter un chemin différent.